L'Ami de la Religion et du Roi

L'Ami de la Religion et du Roi

Lettre mensuelle - 25 décembre 2019

Lettre mensuelle
aux membres et amis de la Confrérie royale
pour le 25 décembre anno Domini 2019
 
Il y a cent ans... Le retour de la Messe de minuit
 
le 24 décembre 2019
en la vigile de la Nativité du Sauveur
 
Chers Amis,
 
 
 
Combien de temps pourrons-nous encore dire, un 24 décembre : « Noël arrive », alors que cette société néo-païenne achève sa « célébration » alors même qu’elle ne fait que commencer ?
 
Nos rues sont illuminées depuis fin octobre – de plus en plus avec des éclairages blafards voire de mauvais goût –, les rayonnages de cadeaux lancent leurs sirènes dans les magasins depuis des semaines, chocolats et bûches ont depuis belle lurette fait leur apparition dans nos pâtisseries, et voilà que déjà les galettes des Rois sont apparues, quand la fête de Noël n’est pas encore passée !
                                                       
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L’on fatigue jusqu’à satiété nos contemporains avec « Noël » et surtout les impersonnelles et inexistantes « fêtes de fin d’année » (qui n’existent pas plus que les fameuses et fumeuses « valeurs de la République »), et la fête de l’Incarnation est vidée de sa substance pour ne devenir qu’une orgie mondaine (mais encore souvent familiale… pour combien de temps ?), et célébrée non plus le 25 décembre, mais le 24 au soir, alors que ce temps est traditionnellement la vigile qui nous prépare dans le silence, la méditation et le jeûne… en tout cas l’abstinence.
 
Quel spectacle nous offre aujourd’hui la matinée du 25 décembre, si ce n’est celle (oserais-je renvoyer à la fin du Père Noël est une ordure – pardon, âmes sensibles ! – qui caractérise si bien en tout notre pauvre société ce jour-là ?) de rues désertes, où circule un camion d’éboueur ainsi qu’un engin de nettoyage de la voie publique maculée d’immondices et des reliques bien matérielles de cette société de consommation, les emballages des plaisirs assouvis, tandis que tout notre petit monde cuve sa soirée arrosée, et passera ensuite le reste des heures du 25 – quand on sera enfin sorti du lit – en pyjama ou, pour les plus courageux, en jogging ?
                 
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Dans l’hyperactivisme de notre époque, où les journaux télévisés font apparaître dans le bandeau inférieur défilant les actualités suivantes, gavant d’informations le pauvre téléspectateur, tout est mélangé afin d’empêcher l’homme de vivre vraiment l’instant et de le sanctifier. Comment ne pas adhérer pleinement à ce que disait Georges Bernanos de la civilisation moderne, « une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure » ?
 
L’essentiel est totalement occulté, mais parce que tous les moyens qui nous y préparaient ont été non seulement négligés, mais contrés et remplacés par leur exact contraire.
 
L’une des grandes erreurs (bien manigancée, ne soyons pas dupes) de notre temps est bien, non seulement de refuser la pénitence, mais de se réjouir quand il n’est pas encore temps. Comment ne pas penser aux paroles de l’Ecclésiaste : « Une bonne réputation vaut mieux que le bon parfum, et le jour de la mort que le jour de la naissance. Mieux vaut aller dans une maison de deuil que d'aller dans une maison de festin; car c'est là la fin de tout homme, et celui qui vit prend la chose à cœur. Mieux vaut le chagrin que le rire; car avec un visage triste le cœur peut être content » (Eccl. VII, 1-4) et de saint Jacques : « Approchez-vous de Dieu, et il s'approchera de vous. Nettoyez vos mains, pécheurs; purifiez vos cœurs, hommes irrésolus. Sentez votre misère; soyez dans le deuil et dans les larmes ; que votre rire se change en deuil, et votre joie en tristesse. Humiliez-vous devant le Seigneur, et il vous élèvera » (Jac. IV, 8-10)
 
Quel rabat-joie, cet abbé de Saint-Taurin ! Et pourtant… « Mieux vaut entendre la réprimande du sage que d'entendre le chant des insensés…[1] » (Eccl. VII, 5). « Car comme le bruit des épines sous la chaudière, ainsi est le rire des insensés » (Eccl. VII, 6), et une joie qui n’est pas préparée dans la pénitence donnera des fruits pourris, comme l’excès d’alcool conduit à un réveil avec la « gueule de bois ». Le terme est fort mais manifeste parfaitement ce que nous voulons faire comprendre, dans la lignée de l’analogie utilisée audacieusement par le Seigneur lorsqu’Il Se permet un « parce que tu es tiède et que tu n’es ni froid ni chaud, je te vomirai de ma bouche » (Apoc. III, 16).
 
Mais il y a bien « un temps pour tout, un temps pour toute chose sous les cieux : un temps pour naître, et un temps pour mourir ; un temps pour planter, et un temps pour arracher ce qui a été planté ; un temps pour tuer, et un temps pour guérir ; un temps pour abattre, et un temps pour bâtir ; un temps pour pleurer, et un temps pour rire ; un temps pour se lamenter, et un temps pour danser » (Eccl. III, 1-4).
 
« Eux » ne savent pas de quelle joie nous sommes animés, nous Catholiques, lorsque nous vivons les temps d’allégresse qui parsèment toute l’année liturgique. Tout est concentré dans ces paroles : « En vérité, en vérité, je vous le dis, vous pleurerez et vous vous lamenterez, et le monde se réjouira : vous serez dans la tristesse, mais votre tristesse se changera en joie. La femme, lorsqu'elle enfante, éprouve de la tristesse, parce que son heure est venue ; mais, lorsqu'elle a donné le jour à l'enfant, elle ne se souvient plus de la souffrance, à cause de la joie qu'elle a de ce qu'un homme est né dans le monde. Vous donc aussi, vous êtes maintenant dans la tristesse ; mais je vous reverrai, et votre cœur se réjouira, et nul ne vous ravira votre joie » (Joan. XVI, 20-22).

 

S. Pie X enseigne dans son Catéchisme : « –A quoi devrait encore s’exercer souvent le Chrétien ? –[…] à la mortification chrétienne. –Qu’est-ce que se mortifier ? –Se mortifier, c’est sacrifier pour l’amour de Dieu, ce qui plaît et accepter ce qui déplaît au sens ou à l’amour-propre » (Catéchisme V, 8).
En plus d’être en Avent, d’avoir passé ses Quatre-Temps, nous sommes aujourd’hui en Vigile.
                    
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(Extrait du Petit catéchisme de S. Pie X)
 
Est-il permis de se rappeler le but du Temps qui se termine ce soir ?
                          
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Et à la question de savoir comment sanctifier le saint jour de Noël, le saint pontife de revenir sur la préparation de la journée-même !
                 

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Pâques par le Carême, Noël par l’Avent, le Dimanche par la semaine, la Vie éternelle par la vie terrestre : nous ne pouvons bien « vivre » un événement, tout instant présent que le Seigneur nous donne comme un trésor, qu’en l’ayant bien préparé. Et même si l’on nous rétorquera que notre tirade sur l’Avent arrive bien tard, et même si l’on confessera que l’on n’a pas assez bien utilisé ce Temps, nous incitons nos lecteurs à relire ce texte l’an prochain, et dès maintenant à prendre la résolution de mieux vivre non seulement le prochain Avent, en 2020, mais tous les temps de pénitence à venir, « afin que votre joie soit parfaite » (Joan. XVI, 24).
 
Comme le disait Notre-Seigneur: « A qui donc comparerai-je les hommes de cette génération, et à qui ressemblent-ils ? Ils ressemblent aux enfants assis dans la place publique, et qui, se parlant les uns aux autres, disent : Nous vous avons joué de la flûte, et vous n'avez pas dansé ; nous vous avons chanté des complaintes, et vous n'avez pas pleuré » (Luc. VII, 31-32). Qui écoute encore les prescriptions (de pénitence comme de joie) de la Sainte Église, quand le clergé lui-même ne vit plus vraiment les temps liturgiques ? Même s’il y a Dieu merci une recrudescence des Ordinations traditionnelles aux samedis des Quatre-Temps comme le prévoit depuis toujours la sagesse ecclésiale, trop de clercs – y compris dans nos « bons milieux tradis » – n’imaginent nullement recevoir le poids des saints Ordres hors des solennités liturgiques et des ors de fête, quand l’esprit de l’Église invite plutôt à s’en revêtir lors de temps consacrés et pénitents. Quel Catholique vit vraiment Pâques et Noël (« Pascua de Resurreccion y Pascua de Navidad », disent nos voisins espagnols) aujourd’hui, alors que leurs préparations, si elles ont quelque peu subsisté, ne suivent aucunement les règles et l’esprit précis de la Sainte Église, précisément dans sa Liturgie dont nous sommes censés vivre ? Comment peut-on goûter (même physiquement, corporellement) la joie de Pâques, alors qu’il n’y a pas eu de privation auparavant, qui nous permet de vivre un contraste nécessaire ? (et aujourd’hui vanté par les magasines féminins… mais uniquement et bassement pour « garder la ligne »).
 
Et rappelant la mémoire de Son Précurseur honoré ces dernières semaines : « Jean Baptiste est venu, ne mangeant pas de pain et ne buvant pas de vin, et vous dites : Il a un démon. Le Fils de l'homme est venu, mangeant et buvant, et vous dites : C'est un mangeur et un buveur, un ami des publicains et des gens de mauvaise vie » (Luc. VII, 33-34). Quoi que dise l’Église, le « monde » et son Prince nous inviteront toujours à faire le contraire : le Corps mystique du Christ appelle-t-il à jeûner ? Lui, nous montrera les plaisirs. A nous purifier ? Il fera étalage d’impuretés. A nous humilier ? Il ne nous fera penser qu’à nous-mêmes. A penser au Dieu naissant ? Il inventera tout ce qui est possible pour nous le faire oublier, jusqu’à ces interdictions de crèches « dans l’espace public », selon la formule désormais consacrée.
 
Et qu’un régime anti-chrétien se comporte ainsi… mais notre Clergé ! Quand nos diocèses, nos congrégations, nos associations « bien cathos » organisent leur repas de Noël… avant Noël, l’on se dit : à quand le repas de Pâques le Vendredi-Saint ? –Mais vous comprenez, me rétorquera-t-on –, après le 24, tout le monde est en vacances, parti en famille… Et que n’organisez-vous pas votre repas de Noël, d’entreprise ou d’amitié, après le 25 ? Et même si la rentrée n’est que début janvier, ne pensez-vous pas que tout janvier est un temps consacré à honorer la Nativité et la Sainte Famille ? Le repas associatif de Noël, ce sera après le 25… et puis après, ce sera encore l’Épiphanie, dans la même joie du même grand mystère, selon des facettes et des tonalités différentes, comme le feu d’artifices de fêtes liturgiques après Pâques. Mais c’est que, voilà, après le 25, il est désormais impensable de continuer, de poursuivre la fête. C’était pourtant ce à quoi nous invitait la sainte Liturgie depuis des temps immémoriaux, jusqu’à ce que « la forme extraordinaire du rite romain » de 1962 ne saccage toutes nos chères Octaves, souvent millénaires ! L’on va célébrer « Noël » tout le mois qui le précède, mais c’est impensable les huit jours qu’il dure réellement et proprement !
 
Mais c’est que par un « glissement », non de terrain mais de temps, Satan a réussi un coup de maître : la fête, c’est désormais la vigile, de même que le mal est devenu le bien… Toute ressemblance avec la tentation et le péché originel… etc. Quand vos chers commerçants vous lancent leur fameux « Joyeuses fêtes », ou mieux (pire) « Joyeuses fêtes de fin d’année », à quoi pensent-ils, sinon aux 24 et 31 décembre ? Si cette date ne représente rien (que S. Sylvestre Ier, le baptiste de saint Constantin, 1er empereur chrétien, me pardonne !), elle est en soi la nouvelle fête du rien de notre société de néant. Certes, minuit marquera le passage au nouvel An, mais alors, même dans une optique « laïciste », n’est-ce pas ce jour-même qu’il faut célébrer ? Et avec une vision proprement catholique, n’est-ce pas le jour octave de la Nativité ainsi que la Circoncision du Seigneur et fête mariale de par tous les textes de la liturgie ce jour-là, qu’il nous faut retrouver, le 1er janvier ? Trouvant en ce 8e jour de Noël la plénitude et complétude de notre joie « natale » en latin (de Noël) ?
 
Mais loin de cet esprit de l’Église, voici (ou « voilà-t’y pas », selon la mode « négative », abaissante et « allongeante » de notre temps) qu’un évêque français vient d’inviter la semaine passée les « seniors » d’une « EHPAD » à célébrer Noël, non pas à 17h, cela ne serait que trop commun…  mais le jeudi 19 décembre ! Non, vous ne rêvez pas !
                         
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Et admirez la liturgie de la Parole ! [2]
 
Sans doute le clergé est-il effectivement en congé le 25 décembre – bah oui, c’est férié ! – tandis que de « grandes surfaces » annoncent leurs portes ouvertes… Dieu ou Mammon, il faut choisir.
 
C’est bien la Messe de Noël (la couleur de la chasuble nous le confirme, en plus du commentaire F.B. de remerciement), célébrée la semaine des Quatre-Temps. A quand une fête de Pâques célébrée en février, parce qu’on envisage un voyage à la fin du Carême, ou tout simplement parce qu’on « a piscine » ?
 
« Il n’y a plus de sujet », a-t-on coutume de dire… Voici que dans la vigne du Seigneur, il n’y a plus de Liturgie, de sujet de liturgie, et en premier : ce sacro-saint Temps, qui marque et scande la Création, et nous voit mériter ou démériter.
 
Voilà pourquoi cette Restauration à laquelle nous travaillons, et qui passe par notre sanctification, nous y mêlerons de la cendre, et qu’avec le mot d’ordre de notre Confrérie, nous profiterons de tous les trésors de la sainte Liturgie que sont les processions pénitentielles, les jours de jeûne, les Messes de vigiles, quatre-temps et pénitence. A ce prix seulement, nous retrouverons la vraie joie des jours de fête liturgique. 

Mais beaucoup trop, quand un Dieu S'incarne, gisent...
 
Et c’est que je ne les entends que trop, ces fidèles tièdes et compromis qui nous expliquent avec amertume : « Oh vous comprenez, c’est dommage mais je ne pourrai pas assister à la Messe de minuit, parce que cette année encore, vient ma famille… ». Mais grand Dieu ! Quand mettront-ils en pratique ce qu’ils affirment professer ! Quand prendront-ils Dieu au sérieux et apprendront-ils enfin que « l’on ne se moque pas de Dieu » (Gal. VI, 7) ?
 
Mais cher Monsieur, chère Madame, il ne tient qu’à vous de changer cela, en prenant dès maintenant votre agenda 2020 et en réservant d’avance pour Dieu toutes les dates… qui ne sont consacrées qu’à Lui ! Noël, c’est en famille ? Noël, c’est d’abord à l’église ! Oui bien sûr, c’est une fête familiale, mais il ne nous est pas demandé d’être rassemblés en famille en la vigile de Noël, mais le jour-même : or, combien organisent encore des repas de famille le jour-même de Noël, qui dans l’esprit de notre époque, est déjà fané ?
 
Que veut donc vous avoir à cette date précise votre famille, votre cercle d’amis, alors qu’il se refuse à célébrer le fond et fonds de cette fête ? Si vos parents et camarades ne célèbrent pas le Seigneur qui vient, alors ils peuvent bien attendre… Leur matérialisme peut se donner libre cours un autre jour.
« L’Épiphanie, c’est la galette, et à la frangipane s’il vous plaît : c’est la tradition ! » : mais qu’a-t-on à défendre des coutumes – certes belles et honorables – quand on ne va même pas à la Messe le jour des Rois ?! 
                      
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Noël, c’est sans doute, pour beaucoup, la grasse matinée : mais alors après, comme nos fidèles et pieux ancêtres, avoir veillé la nuit du 24, être allé à pied (si possible dans la neige, bien abrité sous le grand manteau et avec une torche et un poêle) assister aux « trois messes basses » – je renvoie à Alphonse Daudet, pour en tirer la bonne leçon : on ne s’applique pas aux seules exigences formelles sans ensuite un long temps de purgatoire ! –, et seulement au retour, avoir commencé à satisfaire le ventre, en famille et heureux : ça, c’est Noël !
                      
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Edmond-J. Massicotte : Le retour de la messe de Minuit ; 1919... il y a tout juste cent ans !

 

         Parce que pour le commun des fidèles – que les religieux et chanoines me pardonnent : il y a certes les 1res Vêpres ! –, Noël est impensable chez un Chrétien à l’esprit chrétien, avant minuit ! Je renvoie à la fière rubrique liturgique traditionnelle. La Messe de minuit, que ce soit à 16h ou à 19h30, c’est non !!!
Alors à chacun d’entre nous de décider de changer les choses déjà dans sa propre vie, puisque c’est notre premier champ d’apostolat direct, notre première influence sur un petit bout du royaume de France. Et si l’on ne veut pas s’y résoudre, arrêtons de suite de rêver au sacre du Roi à Reims ! C’est par la christianisation de notre propre emploi du temps que commence la christianisation de notre pays ; par la restauration de la vie liturgique dans notre propre vie, que se réévangélise notre royaume ; par le vrai respect et l’application concrète des lois de Dieu, que se réédifie le royaume de France.
Et le 24 décembre 2020, c’est décidé, je mettrai Dieu en premier et organiserai une vraie fête de Noël, par une préparation lointaine de tout un Avent, immédiate d’une vraie Vigile, et d’un temps consacré à ma famille le 25 et les jours suivants, qu’après avoir salué le Dieu fait homme et hostie dans la Messe – que dis-je ? les (trois) Messes – auxquelles Dieu m’attend.
                            
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 Ainsi, Noël sera redevenu non seulement la naissance du petit Jésus, mais de notre chère Patrie, née cette nuit-là aux fonts baptismaux de Reims.
 
Abbé Louis de Saint-Taurin +
                                  
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[1] « …Mieux vaut entendre la réprimande du sage que d'entendre le chant des insensés »…
[2] Sans parler du petit autel bien rempli et… « branché » !


24/12/2019
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