Sermon de la Messe de la Saint-Louis 2019 à Versailles
Solennité de S. Louis IX, roi de France
Homélie de M. l'abbé Louis de Saint-Taurin
ce dimanche 25 août 2019 à Versailles
Avant de vous dire quelques mots sur le grand Saint que nous honorons aujourd’hui, permettez-moi de remercier M. le Curé pour son accueil dans cette église si symbolique de la Ville royale, et de souhaiter à M. le Prieur de la Confrérie royale – et à chacun des membres de celles-ci, et notamment aux nouveaux que nous recevrons aujourd’hui à l’offertoire – un saint et fervent 4e anniversaire, ad multos annos, pour la sanctification de l’aîné des fils de saint Louis et la pleine réalisation de son auguste mission ! ainsi évidemment que pour la solide formation de Mgr le Dauphin, lui aussi prénommé Louis, et la fidélité de chacun des princes de cette auguste famille capétienne, qui ont l’honneur de voir couler dans leurs veines ce sang royal vénéré par sainte Jeanne d’Arc.
L’abbé Edgeworth eut l’honneur, dit-on, d’annoncer à Louis XVI, après l’avoir préparé à la mort : « Montez au Ciel, fils de saint Louis ! » ; puissions-nous nous exclamer bientôt, à l’adresse de son digne successeur – après avoir participé dans l’ombre au soutien de sa mission : « Gravissez le trône, fils de saint Louis ! », et, avec le Te Deum que nous chanterons en sortie : « et rege eos », et gouvernez-nous, Lieutenant du Christ sur terre, Fils aîné de l’Église, et depuis Ste Marguerite-Marie : Fils aîné du Sacré-Cœur de Jésus !
Les grands Saints ne sont pas simplement des ornements du passé, mais des modèles pour le présent, un piédestal pour nous élever à leur hauteur et devenir ce que nous demandent inlassablement les derniers souverains pontifes : les saints du IIIe millénaire, du XXIe siècle, et d’une France restaurée, revenue à sa mission.
En sa bulle de canonisation qui reprend pour titre les paroles de l’hymne du dimanche des Rameaux, Gloria laus et honor (1297), le pape Boniface VIII invitait ainsi nos ancêtres et leur descendance à la jubilation :
et qui nous fait tant défaut depuis 200 ans, chers Frères !
Un écrivain bien connu, Jean Raspail, prophète désabusé, déclara, il y a quelques années, ne plus croire en la royauté de droit divin. Cette expression fait en effet souvent bien sourire. Mgr de Ségur, l’un des plus grands prélats français et romains du XIXe siècle, fit une mise au point – M. le Prieur et chers membres des Cercles, pardonnez-moi, vous connaissez déjà ses paroles, mais il faut qu’elles retentissent ici pour éclairer les esprits et réchauffer les cœurs :
Le droit divin est donc bien toujours d’actualité, comme le règne édifiant du neuvième Louis, qui pacifia l’Europe, unit les Chrétiens contre le péril commun, écouta sa sainte mère, Blanche, chérit son épouse, Marguerite, et éleva saintement ses onze enfants : pieux à l’église, preux à la guerre, tendre en famille, juste au tribunal (1re vertu royale), sage sur le trône, pacifique avec les autres princes chrétiens, durant ses 43 ans de règne : y a-t-il un Français, quel que soit son ordre ou sa condition, qui ne puisse le trouver comme patron particulier ?
Et dans les situations extraordinaires, quand le pape Innocent IV – qui pourtant le croisa en 1242 et accorda 10 jours d’indulgence à quiconque prierait pour le roi de France -, quand ce pape se désoccupa ensuite du sort de la Croisade et peut-être aussi du salut de l’Europe, le roi jugea qu'il n'« avait trouvé chez le pape aucun sentiment véritablement chrétien » selon l’Anglois Mathieu Paris (MG SS XXVIII), et ce fut alors à ce laïc – car tous nos rois étaient laïcs – de réveiller l’Europe à la place du clergé, et de défendre et faire rayonner la royauté universelle du Christ, ce règne de Dieu que nous demandons à chaque Pater.
Deux siècles après sa mort de Louis IX, la Pucelle d’Orléans le vit en apparition, agenouillés devant Dieu avec S. Charlemagne, et priant pour la France. Mais il n’y a pas que sa personne ou son nom qui soient d’actualité ; il ne portait pas seulement pour la 9e fois le nom de Louis qui nous vient de Clovis : à chaque sacre, comme l’écrivit récemment notre Prieur, c’est bien la grâce du baptême de ce même Clovis qui rejaillit, qui sourd à nouveau et nous fait retrouver les prémices et la source de notre vocation royale, réjouissant chacun de nos foyers, des obscurs villages tels que Cotignac en Provence jusqu’aux capitales comme Versailles. Saint Louis, qui reçut l’onction du sacre à douze ans, continue de porter haut et fier, comme sainte Jeanne d’Arc après lui, l’étendard immaculé de l’alliance du Trône et de l’Autel et, selon les mots du cardinal Pie : « la cause plus que jamais indivise de la religion et de la France ».
Et en ce Prince, la grâce manifesta tout son éclat, lui qui continue d’éclairer et inspirer à chaque génération le Fils aîné de l’Église, qui seul peut apporter véritablement à la France ce titre consort, et lui faire accomplir sa vocation, lui qui est son époux mystique.
Dès 1618, Louis XIII - à l’origine déjà d’une autre fête nationale, celle de son fameux Vœu, le 15 août – fit décréter par Rome « fête d’obligation » la fête de saint Louis, ce roi « qui fit de la religion sa seule politique » selon le P. Charton (Les Saints de la famille capétienne ; 1939). En effet, dans son Siècle de saint Louis, M. Pognon écrit : « Jamais sacre n’avait eu ni ne devait avoir une signification plus plénière, un effet plus entier que le sacre de Saint Louis. Il avait douze ans, ce 29 novembre 1226. Pas un Roi de France, avant ni après lui, ne se regarderait ni ne se conduirait plus absolument comme l’oint du Seigneur, comme un autre Christ ». Mais cela, mes Frères, dépend bien sûr de nos prières.
Louis de Poissy reste présent à l’esprit du monde et au cœur de nos familles, il règne toujours à travers nos Louis, et demeure par excellence le patron tutélaire de notre Patrie, à tel point que chaque église mise à disposition de nos compatriotes dans les capitales étrangères se résume en ce beau titre de « Saint Louis des Français ».
Mgr Laise, qui vient de nous quitter en juillet, était heureux, en Argentine, d’avoir saint Louis comme modèle, et patron de son diocèse ; et le Kremlin n’organisa-t-il pas il y a peu une touchante exposition sur ce roi ? Qui oserait dire qu’il n’est plus d’actualité ?
Mais je sais que je prêche des convaincus ; concluons donc enfin par l’antique prière qui lui est adressée, et qui résume son testament, que le pape saint Pie X demandait à chaque Français de chérir et de considérer comme un trésor, au même titre que celui de S. Remi et de Charlemagne :
Ainsi soit-il.
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