L'Ami de la Religion et du Roi

L'Ami de la Religion et du Roi

Homélie du vendredi 26 mai 2017 (Pèlerinage de la Confrérie Royale au Puy)

HOMÉLIE DU VENDREDI 26 MAI 2017

par M. le chancelier de la Confrérie Royale
à la Messe de saint Philippe de Néri
célébrée au grand-séminaire du Puy
 
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            Monsieur le Grand-Prieur,
            Messieurs les Abbés,
            Mes Frères,
Chers Membres & Sympathisants de la Confrérie Royale,
 
« La joie, écrit Dom Guéranger dans son Année liturgiqueest le caractère principal du Temps pascal : joie surnaturelle, motivée à la fois par le triomphe si éclatant de Notre-Seigneur et par le sentiment de notre heureuse délivrance des liens de la mort. Or, ce sentiment de l’allégresse intérieure a régné d’une manière caractéristique dans le grand serviteur de Dieu que nous honorons aujourd’hui : S. Philippe Néri, « l’Apôtre de la joie » selon le peuple romain ; et c’est bien d’un tel homme, dont le cœur fut toujours dans la jubilation et dans l’enthousiasme des choses divines, que l’on peut dire, avec la sainte Écriture,que le cœur du juste est comme un festin continuel (Pv 15, 15). Un de ses derniers disciples, l’illustre Père Faber, fidèle aux doctrines de son maître, enseigne que la bonne humeur est l’un des principaux moyens d’avancement dans la perfection chrétienne ».
 
Nul doute, chers Amis, que c’est cette même allégresse rayonnante et cette sainte amitié qui nous réunit, à l’intérieur de cette petite (mais qui s’agrandit de pèlerinage en pèlerinage !) cette petite Confrérie Royale. La joie est conquérante : puisse-t-elle, en prenant sa source en Dieu, nous obtenir la victoire de la Cause qui nous rassemble aujourd’hui encore !
 
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            Cette Cause, c’est S. Paul lui-même, qui nous la livre dans sa première épître à Timothée (2, 1-2) : « Je vous exhorte, mes frères, à faire des prières, des supplications, des requêtes, des actions de grâces pour les rois et ceux qui sont élevés en dignité, afin que nous menions une vie paisible et tranquille, en toute piété et honnêteté ». Quoi de mieux alors qu’un pèlerinage pour répondre à cette demande pressante de l’Apôtre, et qui plus est aux pieds de la Vierge Marie, en ce mois qui lui est consacré, au Puy-en-Velay, où se sont déjà pressés tant de nos ancêtres afin de prier eux aussi pour leur Souverain ?
 
            La prière que nous formulons aujourd’hui est double : le retour du roi, et la sanctification du roi. Les thomistes savent en effet que l’agere sequitur esse : notre agir dépend de notre être. Le sage accomplit des actes sages ; le pécheur, lui, accomplit des œuvres de péché (cf. 1 Jn 3, 8). D’où la nécessité de demander non seulement le retour du Roi en France (puisque le Roi, nous l’avons déjà : les lois fondamentales du Royaume nous le désignent !), mais le retour d’un saint Monarque, tout comme ce soir, lors du Salut du Saint Sacrement, nous demanderons à Dieu de nous donner « des prêtres, de saints prêtres, de nombreux et saints prêtres » : à quoi bon obtenir des prêtres, si c’est pour qu’ils soient scandaleux ? À quoi bon le retour d’un roi s’il s’en montrait indigne ?
 
            C’est ce que nous rappelait hier la Lettre mensuelle[1]de la Confrérie Royale : « Les rois sont des hommes, avec leurs qualités et leurs défauts. (…) Mais la Royauté française, par ses vertus intrinsèques, et par les grâces de prédilection divine, porte à la sainteté ses titulaires et ses peuples. La Chrétienté autrefois était admirative des qualités de la lignée royale française, supérieures et plus constantes d’ailleurs que dans beaucoup de royaumes ».
 
Le Roi, c’est le Rex : a recte agenda, celui qui agit droitement. S’il gouverne avec piété, justice et miséricorde, il mérite alors d’être appelé « roi », et s’il manque à ses devoirs, ce n’est plus un roi mais un tyran[2]. L’épître de cette Messe nous rappelle l’importance de vivre de la sagesse : « J’ai demandé l’intelligence et elle me fut donnée. J’ai prié, et l’Esprit de Sagesse est venu en moi. Je l’ai préférée à la puissance et aux dignités. J’ai estimé qu’auprès d’elle les richesses n’étaient rien et que les pierres précieuses étaient sans valeur (…) ; elle est pour les hommes une richesse inépuisable. Ceux qui viennent y puiser acquièrent ces dons de la science qui leur ouvrent l’amitié de Dieu » (Sg 7, 7-14).
 
            Cela nous rappelle l’épisode du roi Salomon. Dieu, pour le remercier de sa fidélité à ses Commandements, lui offrit de le récompenser en lui accordant ce qu’il désirait le plus. Celui-ci, dans un rayon de lumière surnaturelle, vit le prix des choses célestes et dédaigna les choses temporelles pour ne réclamer que la Sagesse : « Accordez à votre serviteur un cœur intelligent pour juger votre peuple, pour discerner le bien du mal » (1 Reg 3, 9) ; « Cette demande plut au Seigneur, et Dieu lui dit : puisque tu ne demandes pour toi ni une longue vie, ni les richesses, ni la mort de tes ennemis, et que tu demandes de l’intelligence pour exercer la justice, voici : j’agirai selon ta parole, je te donnerai un cœur sage et intelligent […] ; je te donnerai en outre ce que tu n’as pas demandé : des richesses et de la gloire, de telle sorte qu’il n’y aura pendant toute ta vie aucun roi qui soit ton pareil » (10-13).
 
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            C’est ce que nous devons demander pour notre Souverain bien-aimé : la sagesse. Le saint Curé d’Ars disait que « le plus grand cadeau que Dieu pouvait faire à une paroisse, c’était de lui envoyer un saint prêtre ». N’est-ce pas le plus grand cadeau que Dieu puisse faire à tout un pays, de lui envoyer un saint roi ? Nos prières, si elles sont ardentes autant que confiantes, ont tout pouvoir sur le Cœur de Dieu.
 
Un épisode de la vie de S. Philippe Néri, « l’un des plus beaux fruits de la fécondité de l’Église au XVIème siècle » (selon la formule encore de Dom Guéranger), nous montre les conversions qu’obtiennent les prières d’un Saint. S. Philippe a bien compris que c’est en touchant la tête qu’on atteint tout le reste du corps ; c’est en s’attachant à la conversion d’un roi que l’on travaille à la sanctification de tout un peuple. Le 25 juillet 1593, le roi Henri IV abjure solennellement le protestantisme en la basilique Saint-Denis. Cependant, sa conversion semble douteuse à certains (vous connaissez le mot qu’on lui prête : « Paris vaut bien une Messe » !), à certains et non des moindres, et en premier desquels le Saint-Père lui-même, trop persuadé que l’ambition du trône déterminait son abjuration. Tandis que le Pape doutait de sa sincérité, S. Philippe, lui, fut rapidement convaincu de l’authenticité intérieure de la conversion du monarque jadis huguenot.
 
Ce n’est que deux ans plus tard, en 1595, que l’affaire de la confirmation de l’abjuration du roi Henri IV sera portée devant la Cour de Rome. L’enjeu était grave : la France restera-t-elle catholique ? C’est la question que l’on se pose à Rome avec anxiété depuis le commencement des Guerres de Religion. S. Philippe va alors jouer un rôle décisif, grâce à son crédit auprès du Saint-Siège, dans la reconnaissance de la conversion de Henri de Navarre qui s’était écrié : « Je désire [par là] donner la paix à tous mes sujets et le repos à mon âme ».
 
L’intuition de S. Philippe concernant la grâce de la conversion, c’était que « seules les personnes peuvent être touchées et converties cœur après cœur, librement, dans le contact et l’influence personnelle. La société ne peut s’améliorer que par cette voie »[3]. Il réussit alors à convaincre le rude Clément VIII de recevoir son abjuration, qui ne l’accordera que le 17 septembre 1595, deux ans après la même reconnaissance par les évêques français, cette fois, passant outre le mécontentement de l’Espagne. Le roi converti n’oubliera jamais, lit-on dans sa Vie par Corsini, « qu’il fut par ce saint homme puissamment aidé à recouvrer la grâce dont l’hérésie l’avait tenu éloigné ».
 
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            Le thème de ce pèlerinage nous fait mieux entrevoir le lien intime, plus encore : l’identité entre le roi et la nation : « L’État, c’est moi » pouvait dire avec raison Louis XIV le Grand. C’est ce lien, précisément, que va briser la Révolution de 1789 en opposant ce qui devrait être uni. « Ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas » (Mt 19, 6). La Révolution, œuvre démoniaque, va séparer ce que Dieu avait uni, en dressant la nation contre son roi.
 
            Nos efforts ont pour but d’œuvrer à renouer cette alliance rompue entre la nation et son roi. Pour le moment, nous sommes un peu comme les convives des noces de notre Évangile (Lc 12, 35-40) : nous attendons le retour de notre Maître. « Heureux ces serviteurs que le Maître trouvera éveillés à son arrivée », nous garantit le Christ, car ils recevront leur récompense. Tenons donc notre lampe allumée pour veiller et éviter de tomber dans la somnolence qui guette tous nos concitoyens. Ravivons notre flamme par une charité ardente entre nous et une prière incessante qui se consume auprès de Dieu. Dans 10 jours, nous fêterons la fête de la Pentecôte : que le Saint-Esprit nous apporte force et consolation dans notre mission ! Qu’« il nous embrase nous aussi, comme le prêtre le demandera dans un instant dans la Secrète, de ce feu dont il a admirablement pénétré le cœur » de S. Philippe Néri !
Ainsi soit-il.

[2] Cf. la XIVème université de Renaissance catholique Le patriotisme est-il un péché ? (2016).
[3] Abbé Bombardier, Le rôle de S. Philippe Néri & de l’Oratoire de Rome dans l’absolution donnée à Henri IV (2003).


30/05/2017
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